Jeu testé sur PC.
Développé par le studio Dice, à l'origine de l'excellente série des Battlefield, Mirror's Edge renoue plus ou moins avec un genre un peu oublié, le jeu de plate-forme 3D, en y ajoutant son petit grain de sel relativement improbable : la vue subjective. Que ceux qui ont déjà imaginé un Tomb Raider à la première personne se dénoncent... Hum, hum.
Remarquez, je m'en doutais. FAITH REBONDITHé oh, c'est pas comme si j'étais tenu de faire des bons jeux de mots. Faith est le petit nom de l'héroïne que l'on va être amené à contrôler pour la faire escalader, glisser, tabasser un peu, s'agripper beaucoup, bondir énormément et parfois quand même, la laisser s'éclater la poire par terre après une chute de vingt étages, parce que son look tendancieusement Tecktonik nous plaît de façon modérée. D'un autre côté, on ne peut admirer sa (bluffante, pour être honnête) modélisation de près que pendant trois secondes environ à le fin du jeu, donc on lui pardonnera ses goûts en matière de maquillage.
La série des Battlefield n'a pas beaucoup exercé Dice au métier de scénariste et ça se sent ; on a droit à un joli éventail de clichés savamment cumulés... Le background est tout juste acceptable, déjà-vu dans pas mal d'œuvres de science-fiction (Equilibrium, Matrix et j'en passe) : dans un futur proche et fortement urbain, la population a choisi la sécurité : caméras de surveillance, flics à tous les coins de rue, informations contrôlées en permanence. Ca, ça va encore. Pour le reste en revanche, on va manger à peu près tous les stéréotypes possibles et imaginables : le pote qui meurt dans vos bras, le gentil-mais-en-fait-non, le méchant-mais-en-fait-non, le type qui se fait abattre en étant sur le point de vous livrer une information capitale et la phrase pseudo-philosophique de bas étage. Sans compter votre fliquette de sœur ; oh, c'est vraiment pas de bol, la société est toute pourrie, moi je joue les acrobates pour faire du trafic d'information et ma sœur adorée est dans la police... Déchirant, vraiment. Tout ça pour dire que vous virevoltez entre les buildings pour retrouver l'assassin d'un ami de votre père, ZZZzzzz...
En vérité, l'intérêt est ailleurs, Mulder. Notamment dans le fait d'effectuer des roulades en vue subjective. Parce que niveau sensations, Mirror's Edge dépote sec ! A travers des niveaux linéaires, autorisant tout de même quelques libertés de cheminement, il s'agira de guider Faith en comptant sur son agilité jouissive, et la recette fonctionne parfaitement. Les acrobaties s'enchaînent, on coure en permanence pour prendre de l'élan, et une petit glissade par ci pour passer sous un tuyau, et un petit saut par là pour voler sur la grue d'en face. Aériennes, souvent vertigineuses, les actions sont à la portée de tous et impressionnantes. Un peu surréalistes bien sûr (la course sur un mur, attraper un rebord après un saut de dix mètres), mais la représentation à la première personne sublime vraiment chaque mouvement, et quelques détails vous rappellent intelligemment que votre personnage a un corps : Faith pose la main contre les murs, on peut apercevoir ses jambes lors d'une roulades, ses mains quand elle sprinte, la caméra reproduit parfaitement les mouvements de tête... Bien souvent, vous serez poursuivi et c'est alors dans l'urgence et la précipitation que vous devrez improviser votre parcours, ce qui ajoute une tension réellement palpable, confère au gameplay intensité et vitesse.
Dans Mirror's Edge, on ne se demande pas souvent si on peut arriver là-haut, mais comment : par où passer pour que ce garde me laisse le temps d'escalader ? Comment prendre assez d'élan pour choper cette rambarde ? Votre "sens urbain", désactivable, surligne en rouge vif tout ce qui peut vous servir à progresser, mais rien de ne vous oblige à le suivre constamment.
Quant à la difficulté, bizarrement, on mourra souvent bien que les sauts ne doivent pas être réglés au millimètre près. Une légère capacité de ralenti vous permettra même de désarmer certains gardes dans un style purement Matrixien ; si vous ratez votre coup, game over assuré. Mais les checkpoints sont très nombreux et, la plupart du temps, bien placés.
DARK CITY INVERSEESans revenir sur le look discutable des différents protagonistes, j'aimerais tout de même évoquer le génial style visuel de la ville dans laquelle on évolue. Pour vous donner un idée, c'est un peu comme si Apple se lançait dans l'urbanisme. L'image est extrêmement lumineuse, à la limite de l'éblouissant, fortement dominée par le blanc, tandis que de larges bandes ou éléments de couleur saturée (bleu, rouge, orange, vert...) parsèment ces décors aseptisés... Stylisé, classieux et volontairement trop propre, une grande réussite du côté graphique.
Finalement, il est tout-à-fait regrettable que Mirror's Edge se plante autant sur certains points particuliers et cruciaux. J'ai déjà évoqué la difficulté un peu trop inégale, cela est renforcé par quelques rares checkpoints foireux et caprices de jouabilité (en particulier le bond de gouttière). Le gameplay repose peut-être un petit peu trop sur le par-cœur ; on ne meurt pas en progressant, on meurt pour progresser... Les ultimes niveaux sont singulièrement retors.
Dommage aussi pour l'histoire nullissime qui, comme si cela ne suffisait pas, se voit encore plombée et rendue plus insupportable par des scènes très typées "animation Flash" pas franchement réussies et surtout, que l'on ne peut pas zapper. Dommage encore, pour l'affrontement final qui n'en est pas un, bouclé en cinq secondes montre en main.
Dommage enfin ; Mirror's Edge est incroyablement court. Mais gravement, hein. Avec Crysis - Warhead, il s'agit du seul jeu que j'ai terminé en moins de cinq heures, ce qui donne un tarif horaire... Hé bien, actuellement, je dirais inacceptable
(ndr : plus vraiment d'actualité aujourd'hui). Heureusement, les versions consoles ont vu leur prix diminuer et la mouture pc bénéficie d'un mode online qui prolonge la durée de vie, mais il n'en reste pas moins que Mirror's Edge est court au point d'être frustrant.
GRAPHISMES 18/20En faisant abstraction du choix contestable des phases animées, Mirror's Edge en met plein les yeux, au sens propre comme au figuré. Grand, beau, propre, original, l'aspect visuel est un pari gagné. La technique au service du style ! A noter tout de même la grosse blague de l'optimisation bonus PhysX (sur PC uniquement) qui doit bien diviser le framerate par 6 sans carte PhysX...
SON 15/20Rien d'inoubliable, les musiques demeurant de toute manière discrètes, elles se permettent toutefois de rythmer et d'intensifier l'action lors de certaines phases... Sans génie, mais efficace.
SCENARIO 08/20Quand on sait pas élaborer un scénario, on embauche quelqu'un quoi...
GAMEPLAY 18/20Du très bon ! Old-school, ça oui, avec des échecs à répétitions sur un même passage, mais absolument pas écœurant.
DUREE DE VIE 06/20Difficile de ne pas être déçu. Moins de six heures de jeu, c'est très insuffisant, sans compter sur un taux de rejouabilité plutôt faible. Le mode online compense, mais pas assez... Un éditeur de niveau aurait été une très bonne idée, on devra se contenter de contenu officiel téléchargeable.
ET DONCLa durée de vie plafonne la note. Mirror's Edge peut se défendre en clamant à juste titre qu'un bon jeu est forcément trop court... C'est vrai, on en voudrait plus parce que c'est fun. Mais cela n'excuse pas tout, la durée de vie n'est pas la seule en cause. Le dernier bébé de Dice est bon, mais pas parfait.
En résumé, Mirror's Edge est un peu un Assassin's Creed différent mais clairement mieux, et si on mélangeait ces deux-là, on obtiendrait sans nul doute un résultat tout-à-fait monstrueux.
16/20
[PC/PS3/Xbox360] Mirror's Edge, Le "fil du miroir", ahah n'importe quoi
