[pamphlet] Éloge de la Violence

[Rufus]

"La violence ne mène à rien." est sans doute l'un des adages les plus usités parmi les pacifistes et autres bien-pensants de notre époque. Seulement, ce qu'on oublie souvent, c'est qu'en fin de compte, la vie, elle-aussi, ne mène à rien. Du moins, en termes de finalité, puisque celle-ci est la mort. Après, cela dépend de vos convictions religieuses ou philosophiques quand il s'agit de définir une éventuelle situation post-mortem. Ceci est bien sûr un autre vaste débat dont le sujet n'est pas ce qui nous préoccupe aujourd'hui. Laissons les morts en paix et restons entre vivants, je vous prie. Ce prologue était juste là pour montrer l'absurdité du proverbe et que la violence, malgré elle, peut mener à quelque chose.

La violence, donc. Souvent, le terme renvoie à tout un tas d'images négatives et de mauvais usages qui en sont faits. Pas besoin d'exemples, il vous suffira d'ouvrir un journal ou de regarder le 20 heures pour en avoir à la pelle et se rendre compte que la violence est omniprésente dans notre société. Partie indéniable de la nature humaine? J'en suis convaincu. De quelle violence est-il question, au juste? Pas l'acte en lui-même, mais le sentiment, la pulsion, l'émotion qui dort au fond de nous et se réveille soudainement, souvent hors de notre contrôle et pour des motifs qui sont sans doute aussi nombreux que les humains eux-mêmes. En général, la violence conduit à des actes répréhensibles, souvent regrettables. Mais il s'agit aussi d'une force formidable et c'est là un de ses aspects positifs souvent mis de côté, à tort.

Car notre société civile semble aujourd'hui avoir un gros complexe vis-à-vis de cette violence, pourtant présente chez chacun de ses citoyens. Par le passé, cette crainte fut comblée par le fait que l'État, et la Noblesse avant lui, s'étaient accaparés le monopole de cette violence pour en user à leur bon gré et parfois, pour défendre une certaine justice afin de maintenir l'ordre. Le philosophe Blaise Pascal résumait cette logique très simplement: "Ne pouvant faire en sorte que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste." Voilà pour le principe. Qu'en est-il aujourd'hui en Europe Occidentale? La société civile, traumatisée par les atrocités de la seconde guerre mondiale, semble avoir purement et simplement banni la violence de son existence, exception faite de l'armée, des forces de police et de l'appareil judiciaire. Mais, concernant les citoyens, ceux-ci sont aujourd'hui présumés comme dépourvus de toute violence. Grave erreur, si l'on regarde les exemples cités plus haut.

Que faire pour canaliser cette violence? À ce jour, seules les disciplines sportives semblent avoir apporté une réponse satisfaisante à mes yeux. Outre cet avantage de canaliser ce feu qui brûle en nous, le sport offre également des tas d'autres bienfaits pour la santé, le corps, l'esprit, etc. qu'il serait inutile d'énumérer ici. Je ne suis pas en train de faire de la pub pour Decathlon, simplement soulever le fait qu'en termes de politiques civiles et éducatives, le constat est assez accablant. Hormis un pitoyable cours d'éducation physique dispensé de manière obligatoire dans le cadre de l'enseignement, le reste de la culture sportive est laissé à la liberté de chacun. Un avantage, diront certains. Une inadéquation, surtout. Pourquoi à ce point favoriser l'esprit en l'obligeant à accumuler des masses de matières, parfois superflues, et délaisser quasiment tout l'aspect physique? "Un esprit sain dans un corps sain." disait un autre philosophe célèbre. Il faut croire que l'adage fait lettre morte dans l'idée de "Bien commun" que les politiques prônent pour notre société.

Et quelle erreur! La violence a besoin de s'exprimer, de s'épanouir et de devenir une force positive. Si elle ne le fait pas dans le sport, elle le fera dans une discipline artistique ou dans le travail. Et si elle ne peut s'exprimer de cette manière, il est fort probable qu'elle le fasse à l'encontre d'une tierce personne... Il est selon moi ridicule de vouloir se défouler, d'exprimer sa violence au travers des jeux vidéos ou de tout autre virtualité. En effet, la violence -le sentiment- est quelque chose de purement physique. Or, un univers virtuel ne sollicite que l'esprit et les réflexes les plus élémentaires. La violence ne s'y exprime donc pas vraiment, mais se trouve refoulée à l'arrière-plan. Tandis que celui qui retourne cette violence contre lui en s'infligeant un entraînement sportif verra tout de suite les effets bienfaiteurs que cela apporte, par-delà la douleur et l'effort. Mais il est des expériences auxquelles les mots ne conviennent pas et celle-ci en fait partie, à mon sens.

Tout ça pour dire que la violence peut avoir quelque chose de noble et de bienfaiteur, pour qui sait en tirer son meilleur parti et qu'il faudrait peut-être qu'on cesse de vouloir la bannir à tout prix de partout car, comme le dit l'adage, « Chassez le naturel... »

[Eölen]

L'an dernier j'ai campé avec des anarcho-pirates. Eux avaient une autre conception de la violence. Elle ne ferait pas partie de la nature humaine mais sera subie par la société. Nous parlons de publicité dans un autre sujet, et bien c'est une des violences que nous subissons, comme l'ordre social, l'ordre moral, les religions, le travail dans sa logique de prostitution d'une possibilité à agir, etc.
On subirait donc beaucoup d'attaques et notre besoin de violence viendrait d'un besoin de ramener l'équilibre.
Pour se faire, ils prônaient diverses activités très saines tel que la destruction de panneaux publicitaires, l'épandage de goudron et de plumes sur les distributeurs de billets ou la décoration des façades de fast-food.
Bref, une violence physique contre les structures et non contre les personnes. Enfin, c'est le point 6 de leur manifeste. Je peux vous en parler davantage si ça vous intéresse.

Par ailleurs, je ne partage pas ta conclusion sur la noblesse de la violence. L'être humain tangue entre son instinct de vie et son instinct de mort et la violence est guidée par le second (comme le tabagisme ou l'alcoolémie). On oscille toujours entre les deux et je crois que c'est mieux ainsi, car on a alors accès à une gamme de sensations et de sentiments plus large et plus variée. En ne considérant que le choix de rejeter la violence ou de l'utiliser comme une valeur positive, on s'enferme dans un schéma qui n'englobe pas la totalité. L'un comme l'autre limitent la créativité et notre vision du monde. La violence est une manifestation humaine (sociale ou non, à vous de voir) qui est. Elle n'est ni à combattre ni à glorifier, il me semble qu'il est bien préférable de l'accepter comme une de nos possibilités de réaction, un des éléments de notre palette émotionnelle que l'on peut utiliser lorsque ça nous semble bien pour nous de l'utiliser.
Mais cela implique de nombreuses remarques et il est tard, aussi je terminerais là, et laisserais le sujet ouvert ! Lâchez-vous ! Violemment ^^

[Rufus]

Et pourtant, la Violence est quelque chose de très noble! La noblesse était avant tout la caste des gens d'armes, donc ceux ayant le monopole de la violence. S'il est vrai qu'aujourd'hui on utilise l'adjectif "noble" à toutes les sauces, je le vois avant comme désignant une force agissant pour un juste idéal.

Sinon, je rejoins ta position quant au fait que la violence est part intégrante de la nature humaine et qu'il est à mon sens absurde d'entendre la renier. Et il n'y a que le titre de mon article qui parle d'un éloge de la violence dans son ensemble. Je ne glorifie nullement tous ses aspects et ses usages. Juste ceux qui s'avèrent donner un résultat positif.

[Megamoi]

Oui bof non, je ne sais pas.

Inciter les gens à faire plus de sport ? Oui, pourquoi pas, surtout pour une certaine caste élitiste qui le voit comme une activité dégradante, à tord.

Mais dire que par ailleurs, on cultive trop l'esprit ? Je sais pas, tu fais probablement références aux mathématiques à l'école, je suis d'accord, mais il me semble qu'à part ça, on peut difficilement parler de choses inutiles.
Et puis c'est vrai pour une petite frange de la population à laquelle nous appartenons. Quand je sors tôt de la fac, et que je vois des tas de gens désœuvrés dans les rues, quand je suis dans le train et que je vois les gens qui rentrent du boulot, je me dis qu'ils cultivent au moins aussi peu leur esprit que leur corps !


Où je veux en venir ? Apprendre à canaliser la violence et à l'utiliser, d'accord, mais surtout pas au dépend des capacités intellectuelles et créatives, qui à part pour les étudiants et lycéens (et encore, de bon lycées) sont tout autant laissées de côté. Ya qu'à voir comme l'expression "Masturbation intellectuelle" est dans toutes les bouches, par exemple.

[Sven Lodorf]

A dire vrai, Mega, tout le monde n'as pas une technique de marche ou de respiration à exercer.

Je pense que c'est une question d'éducation ou un manque de curiosité(bien que les deux peuvent être liés).



Hum...désolé, je suis sans doute à coté de la plaque.