Dessin : Takeshi Obata
Scénario : Tsugumi Oba
12 tomes édités chez Kana
Si il y a bien un shonen qui a fait un tabac ces dernières années c'est celui-ci : Death Note. Si il n'est pas rare qu'un manga connaisse un tel succès en si peu de temps, il est moins commun que ce soit le cas d'une histoire quasiment dénuée de scènes d'actions, et dont l'intrigue ne s'écoule que sur douze tomes, à la fin desquels la conclusion donne l'impression que chaque chapitre précédent a été créé sans laisser une goutte de hasard s'immiscer dans la mécanique diabolique du scénario. Le genre est plutôt en effet apte à rallonger la sauce à l'infini, comme le prouvent les classiques que sont One Piece et Dragon Ball. Mais Death Note ne partage avec qu'eux que le style nippon : une façon de mettre en scène, quelques tics graphiques, une certaine classe des personnages. A part ces quelques lignes de base du manga, Death Note sort complètement des sentiers battus, et nous offre une merveille d'intelligence et de créativité.
Pour ceux qui seraient passés à côté du spitch de base, l'histoire est celle de Light Yagami, lycéen japonais brillant, qui trouve un cahier de la mort, objet qui a la capacité de faire mourir la personne dont on connait le nom et le visage. Light va se servir très vite de ce pouvoir terrifiant en commençant à éliminer tous les criminels de la terre, dans le but drama-utopique de créer un monde parfait, peuplé d'habitants bons et lavé de toute forme de pêché. Il sera néanmoins très vite embêté par L, super inspecteur secret envoyé par Interpol afin d'empêcher notre héros de mener son plan à terme.
Death Note met donc en scène l'immense jeu d'échec mental que se livrent L et Light, afin de se démasquer - et de s'éliminer - mutuellement. Il y a bien sur de nombreux autres protagonistes, mais ils ne sont au final que des rouages dans l'affrontement des deux psychopathes en culotte courte que sont les personnages principaux. Le récit est donc une mise en parallèle des deux enquêtes, des conclusions, des indices et des mouvements qui permettront à l'un d'empêcher l'autre de nuire, le tout par l'intermédiaire de longs dialogues, voir monologues intérieurs, révélant chacun le génie tout autant que la folie du scénariste : Tsugumi Oba, dont la réflexion va très souvent au-delà de la capacité humaine à pousser des raisonnements.
Le dessin est quand à lui pris en charge par Takeshi Obata, qui, même si j'avoue ne pas être un inconditionnel de son style, livre un graphisme tout à fait en phase avec le propos, d'une technicité exemplaire, jouant infiniment sur les détails de visage et les angles de vue, afin de rendre l'histoire, pourtant si statique, incroyablement passionnante. Jamais on ne se lasse , et certaines cases sont même chargées d'une intensité absolument incroyable, notamment lors du dénouement.
Mais au delà d'un dessin maitrisé et d'une intrigue à la profondeur incroyable, Death Note m'a captivé pour une raison particulière. Si on y retrouve à peu près un personnage bon et un personnage mauvais, jamais un véritable jugement n'est rendu, laissant au lecteur le soin de se forger son propre verdict. Les intentions originales de chaque personnage sont justifiées, et leurs points de vue, souvent extrêmes, sont toujours cohérents avec leurs vécus et leurs personnalités. Le manichéisme primaire n'a absolument pas sa place dans Death Note. Même les personnages absolument exécrables finissent par devenir attachants quand on en apprend plus sur les motivations qui les poussent à agir. Aucun n'est complètement noir, ni complètement blanc, et ça, ça rajoute encore une couche de crédibilité et de puissance à l'ensemble.
Vous l'aurez donc compris, j'ai été scotché par Death Note, et même si il souffre de quelques défauts, comme plusieurs baisses de rythme, et un nombre de noms japonais et de situations parfois élevés à retenir pour comprendre chaque dialogue, l'ensemble s'avère juste génial, voir indispensable. Et savoir qu'un manga aussi original, intelligent et anti-moralisateur aie connu un succès si énorme ne peut que m'enchanter. Je vais maintenant ranger les douze tomes dans une belle armoire fermée à clef, et attendre que ma mémoire se soit suffisamment détériorée pour les relire et en déguster à nouveau l'incroyable conclusion.
Par contre je n'ai pas vu l'anime, et j'en ai entendu des critiques aussi élogieuses que catastrophiques. Quelqu'un ici a-t-il un avis là dessus ?
Edit : ah oups, il existait déjà
un topic sur Death Note en fait... Pom pom pom pom...